Par Sylvain Berrios – La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a choisi le passage en force pour son projet de loi plutôt que la concertation avec les parlementaires et les acteurs du secteur de la santé. En effet, malgré les débats et les améliorations apportées par les sénateurs, le gouvernement choisit de rétablir le texte adopté initialement par l’Assemblée nationale. A ce titre, deux exemples illustrent parfaitement l’amateurisme et les choix idéologiques du gouvernement.
Tout d’abord, pour mémoire, les articles 8 et 9 du projet de loi lèvent le tabou de l’interdiction d’injection de drogue par intraveineuse et infléchissent le périmètre de la mission de santé publique en réécrivant l’article L3121-4 du code de la santé publique traitant de la politique de santé publique de réduction des risques. J’avais déposé, en première lecture, avec mes collègues du groupe Les Républicains, un amendement de suppression de cet article. Au sénat, les sénateurs avaient introduit l’objectif thérapeutique dans le cadre des parcours de soins individualisés pour chaque patient et prévu un plus fort encadrement de cette expérimentation contre l’avis du gouvernement. Le lieu choisi devait être intégré dans un hôpital sous la responsabilité des professionnels de santé; et, tout projet devait faire l’objet d’un concertation, en amont, entre l’ARS, la structure porteuse et le maire de la commune concernée. Mais le gouvernement socialiste a préféré passé outre les recommandations du Conseil d’Etat qui considérait que l’ouverture d’une salle de shoot n’est pas conforme à la loi en vigueur, et balayer les propositions des sénateurs réinscrivant le texte de loi dans la droite ligne des politiques de santé publique et de lutte contre la drogue menées en France depuis vingt ans par tous les gouvernements.
Par ailleurs, autre cheval de bataille de Marisol Touraine : la généralisation du tiers-payant. Malgré une réécriture totale de l’article 18 du projet de loi, en commission, et l’opposition de la très grande majorité des médecins, la ministre a maintenu son article généralisant le tiers-payant. Cette généralisation est menée à marche forcée et elle sera une obligation pour les médecins qui ne pourront que s’y soumettre. Or, elle ne répond pas à l ‘objectif affiché d’améliorer l’accès aux soins puisque cela ne changera rien au niveau des remboursements dans l’optique et les prothèses dentaires dont le prix est la principale cause du renoncement aux soins. Sans répondre à son objectif, Marisol Touraine et le gouvernement mettent les médecins devant une situation intenable. Aucune réponse technique n’est apportée pour créer un système simple alors que les médecins sont déjà débordés par les tâches administratives, ils vont devoir gérer tous les impayés comme le font déjà les pharmaciens. En outre, personne ne sait à quel point cela sera inflationniste et pèsera sur les comptes de l’assurance maladie. En première lecture, j’avais déjà demandé la suppression de cette mesure inepte. Les sénateurs l’ont confirmée. Mais le gouvernement préfère faire la sourde oreille et maintenir son article.
Ainsi, face à l’entêtement du gouvernement dans son raisonnement idéologique et au saupoudrage de mesurettes masquant les incompétences à gérer les problèmes de fond de notre système de santé, j’ai voté contre ce projet de loi avec mes collègues du groupe Les Républicains.